musicologie

7 mai 2022 — Jean-Marc Warszawski.

Alexandra Lescure, Domenico Scarlatti et Pancrace Royer

Alexandra Lescure (piano), Extase baroque, œuvres de Domenico Scarlatti et de Joseph Nicolas Pancrace Royer. Calliope 2022 (CAL 2299).

Enregistré à l'auditorium Campra du Conservatoire d'Aix-en-Provence, 16-18 août 2021.

Après un très bel enregistrement d’œuvres de Scarlatti fils, Haydn, Mozart (Ilona Records 2020), la pianiste Alexandra Lescure nous offre un nouveau bel enregistrement d’œuvres de Scarlatti le même et de Joseph-Nicolas-Pancrace Royer. Rapprochant ainsi un italo-ibérique d’un Italo-français, tous deux ayant partagé cinquante années du calendrier de la première moitié du xviiie siècle.

On connaît assez la caverne d’Alibaba aux 550 sonates de Domenico Scarlatti, que Scot Ross a fait aimer, sinon a révélé au monde depuis son clavecin, il y a près de quarante ans, et dont on ne finit pas de découvrir les richesses qui se prêtent avec la meilleure volonté du monde au piano.

Pancrace Royer est loin d’avoir la même notoriété : même si les clavecinistes en pincent couramment les œuvres, les marteaux des pianistes les font rarement résonner. Il fut pourtant un musicien très influent de son temps, compositeur du roi, directeur du Concert spirituel, inspecteur de l’Opéra. Il a composé des opéras, des ballets, des motets, de nombreuses pièces de clavecin dont un cahier de 14 numéros fut édité de son vivant en 1746. Ces pièces, parfois en relation avec des arias de ses opéras, prennent place, de fait, dans l’histoire du clavecin français, mais s’adressent à un public plus large que celui du salon aristocrate, elles veulent plaire par des effets plus directs, plus appuyés, des oppositions plus contrastées, de la langueur à la fureur, plus que par la rhétorique et des maniérismes convenus. Un italianisme au royaume de France qui fait bonne figure sur ce cédé à celui de Scarlatti d’Espagne et de Portugal.

Nous apprécions beaucoup le choix, pour le plaisir, des pièces enregistrées, la vigueur, voire la joyeuseté des épisodes rapides, l’intonation et l’accentuation qui donnent parfois envie de danser, la prosodie et la poésie élégamment phrasées des passages amoureux ou nostalgiques. Une mention spéciale pour le Vertigo (= hiver) réplique à celui de Vivaldi des Quatre saisons, qui par ses bombardements d’accords, particulièrement dans le registre grave, l’entassement de traits de virtuosité vertigineuse, les assauts de contraste, pourrait n’être qu’un numéro de cirque et de laideur sonore. Ici on monte à la frénésie sans forcer le son du piano, tout est audible, détaché, expressif, dans un magnifique théâtre sonore. En fait nous apprécions beaucoup un peu tout de cet enregistrement, dont aussi l’émotion chantante exprimé des lignes mélodiques les plus simples.

Domenico Scarlatti, Sonate en sol mineur K. 35, 1er mouvement (extrait), plage 1.

Jean-Marc Warszawski
7 mai 2022
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